Le temps des traîtres
|On se souvient (enfin, ceux qui n’ont pas la mémoire trop courte) qu’un certain Nicolas S., de Neuilly, a été tricard au RPR pendant un septennat après avoir eu la bonne idée de trahir son mentor (un certain Jacques Chirac, célèbre en son temps pour avoir poignardé Chaban-Delmas en soutenant Giscard à la présidentielle de 74) pour Edouard Balladur, alors donné gagnant des élections présidentielles de 95. Balladur a explosé en vol, et le traître a traversé un bon bout de désert avant de réapparaître en 2002. Amende honorable, tout ça, il s’est retrouvé ministre de l’intérieur ou des finances pendant cinq ans.
Aussi n’est-ce peut-être pas un hasard si on assiste ces temps-ci à une grande valse-outing des traîtres, poignardeurs dans le dos, pourrisseurs de réputations et assimilés.
Au premier rang, je demande : les 27 députés UDF qui viennent de rejoindre l’UMP. Mais oui, bien sûr, c’est uniquement par conviction politique et pas du tout pour éviter de se retrouver face à un candidat UMP aux législatives… Félicitations, les gars, c’est beau, l’honneur.
En seconde position, le Traître officiel du PS, le type qui a passé six mois à vomir sur Sarkozy et qui, finalement, sentant le vent tourner, a fait à son tour la girouette, j’ai nommé Éric Besson. Il a annoncé qu’il ne serait pas candidat aux législatives (on se demande bien pourquoi… Serait-il suspect même aux yeux des électeurs UMP ?), mais faisons-lui confiance pour avoir trouvé un parachute ailleurs : il refuse de répondre quand on lui demande s’il pourrait faire partie d’un gouvernement Sarkozien…
En troisième place, j’en parle parce que j’ai été scié de le revoir à la télé hier soir (je le croyais — je l’espérais — tricard à vie et partout), je vais juste pour le plaisir rappeler un nom qui évoquera plein de bonheur au SNES : Claude Allègre. L’ami personnel de Jospin, le socialiste convaincu, qui ne peut tellement pas blairer Ségolène Royal qu’il préfère suicider son propre camp en se pointant au QG de campagne de Sarkozy deux jours avant le second tour ou en traitant le candidat PS (candidat est invariable d’après l’Académie française : c’est une fonction, pas une personne) de menteuse au lendemain du débat Sarko-Royal. Merci Claude. Les étudiants en science se souviennent de toi, les profs se souviennent de toi, maintenant, les socialistes ne t’oublieront pas…
Chaque fois que ma fraction manque d’appuis,
Ma conscience m’ordonne de changer de parti.
Frederik Mey in Le politicien.
Je ne sais faire qu’un seul geste :
Celui de retourner ma veste.
Jacques Dutronc in L’opportuniste.