Pré­cé­dent Intro­duc­tion Sui­vant

Le soir du 21, nous ten­tâmes tous de bien dor­mir. Même Mona dor­mit bien ; en fait, elle avait appa­rem­ment appris à décon­nec­ter son cer­veau aux heures de som­meil. Elle tom­bait comme une masse et dor­mait, presque sans rêver, d’une traite jus­qu’au réveil.

Le 22 au matin, cha­cun prit un fusil et des balles, et nous des­cen­dîmes sur le flanc ouest de Char­vest, vers Bouquet.

Nous avan­cions en silence, res­tant à cou­vert, nous glis­sant entre les arbres. A dix heures, Claude, qui menait le groupe, nous fit signe de nous arrê­ter. Il fit pas­ser le mot, à voix basse :

– On attend. Chasles doit lan­cer l’attaque.

 

Nous étions sur un pro­mon­toire, à deux cents mètres de l’en­trée du vil­lage. Sur la place, une demi-dou­zaine de véhi­cules mili­taires sta­tion­naient ; nous voyions des hommes, ici et là, dans les ruelles ou les bâtiments.

A droite et à gauche, deux routes mon­taient vers des hameaux de la commune.

 

Il y eut un bruit, une série de croas­se­ments, sur notre droite. Les plus proches poin­tèrent leurs fusils et un homme sor­tit des bran­chages, les mains loin du corps. C’é­tait un Chaslois.

– Salut, mur­mu­ra-t-il. Qui dirige ici ?

Claude s’ap­pro­cha de lui.

– J’é­tais à la réunion d’hier. On peut dire que c’est moi.

– Vous êtes prêts ?

On se regar­da en silence. Bien sûr, nous étions prêts ! Guère enthou­siastes, certes, mais prêts.

– Je fais le tour du vil­lage pour véri­fier que tout le monde est là. Puis on lan­ce­ra l’at­taque. On com­men­ce­ra par un tir de roquette sur leurs véhi­cules. On a trois roquettes. A la troi­sième, tout le monde fonce.

– Enten­du.

Le visi­teur repar­tit vers le Sud. Il dis­pa­rut dans la végé­ta­tion comme il était appa­ru et le silence revint.

 

Mona obser­vait aux jumelles. Après quelques minutes, elle me les prêta.

Il y avait la mai­rie, qui ouvrait sur la place du vil­lage. Au-des­sus, les appar­te­ments de fonc­tion des ins­ti­tu­teurs, loués depuis la fer­me­ture de l’é­cole. Mani­fes­te­ment, des gens dor­maient là ; on voyait, par la fenêtre, deux lits recou­verts d’une forme allongée.

Dans la mai­rie, der­rière la grande table de réunion, un homme sem­blait rem­plir les papiers d’une tâche admi­nis­tra­tive quel­conque. Un autre mar­chait len­te­ment dans la pièce, droit, en parlant.

Dehors, une troupe d’une tren­taine d’hommes cou­rait sur la piste — sans doute pour gar­der la forme.

Le reste devait patrouiller dans les hameaux, plus haut ; car quelques traces de pneus témoi­gnaient que d’autres véhi­cules dor­maient habi­tuel­le­ment sur la place, où ne res­taient que deux camions et quatre jeeps.

Le long de la mai­rie, une rue par­tait vers le centre du vil­lage. A cent mètres au-des­sus de celle-ci, au bout d’une ruelle, la place de l’église.

En face de nous, légè­re­ment déca­lés au sud, je repé­rai quelques civils armés, prêts à fondre sur le village.

Je ren­dis ses jumelles à Mona.

 

 

Il y eut encore une longue attente. Per­sonne ne par­lait ; ceux qui croyaient encore priaient silen­cieu­se­ment, les autres se tai­saient, avec la patience d’un pré­da­teur guet­tant une proie.

 

Puis, sou­dain, il y eut une explo­sion en face de nous, sur la col­line ; un trait rouge fusa droit, frap­pa un véhi­cule et se trans­for­ma en boule incandescente.

La jeep se sou­le­va de près d’un mètre et retom­ba contre sa voi­sine, à laquelle le feu se propagea.

Un deuxième trait de feu frap­pa un camion, qui res­ta éton­nam­ment immo­bile, tout en écla­tant sur place.

Un troi­sième échoua au pied d’une jeep ; mais la boule de feu se glis­sa sous la voi­ture et y brû­la assez long­temps pour que le car­bu­rant s’en­flamme. Il y eut une gerbe de feu qui jaillit par la trappe d’es­sence et la voi­ture, dou­ce­ment, prit feu à son tour.

 

Ce fut alors le signal. Les maqui­sards se levèrent, cou­rurent en avant, fusil à la main, tirant sur les mili­taires à l’entraînement.

Je cou­rais aus­si, per­du dans la masse, mon fusil mitrailleur au bout du bras, tirant et tirant encore sur les uni­formes que je voyais.

La culasse cla­qua à vide, et j’é­tais à l’en­trée de la place, et j’eus peur de ne plus pou­voir me défendre. Je n’a­vais pas d’a­bri, nulle part où me cacher pour rechar­ger mon arme, et je me deman­dai brus­que­ment à quoi cela pou­vait bien avoir ser­vi d’a­voir por­té cinq char­geurs depuis Char­vest, puisque je n’au­rais pas le temps de rechar­ger, puisque j’al­lais mou­rir ici avec un char­geur vide dans mon arme et quatre pleins à ma taille.

Mais le trou­peau conti­nuait à cou­rir et, l’ins­tinct gré­gaire repre­nant le des­sus, je m’y mêlai réso­lu­ment. Nous avan­çâmes ain­si ; les balles nous tom­baient des­sus des fenêtres des appar­te­ments, et ceux qui avaient su gérer leurs muni­tions mieux que moi conti­nuaient à tirer vers les ouver­tures dans l’es­poir de tou­cher les tireurs.

Un homme tom­ba devant moi. Il s’ef­fon­dra d’un coup, inter­rom­pu en pleine course, et s’al­lon­gea sur le sol. Pous­sé par la masse, sans réflé­chir, je conti­nuai à cou­rir. Je pris appui sur lui ; il n’é­tait pas mort. Il se retour­na brus­que­ment et mon pied glis­sa par terre. J’at­ter­ris sur les genoux et, sou­dain, je me vis mort. La cer­ti­tude revint : j’al­lai mou­rir là, absur­de­ment, avec des char­geurs pleins à ma taille. Non ! Sor­tir, sor­tir du piège ! Je fus debout de nou­veau et cou­rus, plus vite que je ne l’a­vais jamais fait, au point de me retrou­ver en pre­mière ligne, mon fusil tou­jours vide à la main.

Un recoin, un angle de mur. Je le vis du coin de l’oeil et, aus­si­tôt, ma course s’in­flé­chit. Je me recro­que­villai dans l’angle d’une porte, au ras du mur, fai­sant l’im­pos­sible pour que rien de dépasse.

Je me remis à res­pi­rer et, alors seule­ment, je me ren­dis compte que j’é­tais en apnée depuis plu­sieurs dizaines de secondes. Le souffle court, hale­tant d’une res­pi­ra­tion rauque, je res­pi­rai quelques secondes. Une sueur froide et pois­seuse rou­la le long de mon dos ; je la sen­tis des­cendre sur mes reins, dégoû­tante, gluante.

 

Je vis des gens cou­rir. Des hommes, des femmes pas­saient en cou­rant, armes à la main. Cer­tains tom­baient tan­dis que la grêle de plomb conti­nuait à s’a­battre. Je devais les rejoindre. Mes mains fébriles sou­le­vèrent le fusil, sai­sirent un char­geur plein à ma cein­ture. Le char­geur vide tom­ba, et je le lais­sai là, au sol, tan­dis que je plan­tai l’autre à sa place.

– Main­te­nant, il faut y aller, me criai-je à moi-même.

Et, sou­dain, mes mains se mirent à trem­bler. Mes genoux se cognèrent en une série de chocs sourds, mes cuisses se relâ­chèrent et je tom­bais accrou­pi, tou­jours appuyé au mur. La peur vint et les larmes cou­lèrent. Je res­tai là, hoque­tant et san­glo­tant, tan­dis que d’autres tom­baient à quelques mètres, que des coups de feu cla­quaient, que des hur­le­ments ryth­maient la course des maquisards.

Je rele­vai les yeux, et Yoru était devant moi. Ses yeux noirs ouverts en grand me fixaient dure­ment, avec pour­tant une nuance de pitié quelque part.

Puis elle repar­tit à l’as­saut, cou­rant avec le trou­peau, et je m’a­per­çus que mes mains ne trem­blaient plus. D’un coup d’oeil, je repé­rai un tireur dans un appar­te­ment. Après une seconde où, appuyé de nou­veau à l’a­bri du mur, j’ar­mai mon fusil, je sor­tis cal­me­ment, épau­lai et, d’une seule balle, abat­tis l’homme. Il tom­ba par la fenêtre comme dans les plus mau­vais wes­terns et je me remis à cou­rir, avec un trou­peau de maqui­sards que je ne connais­sais pas.

Je ne tirais plus comme un fou. Trois, quatre balles soi­gneu­se­ment envoyées dans une direc­tion pré­cise. Des petites rafales courtes, ciblées.

Je ne vou­lais plus me retrou­ver seul, cible par­mi les cibles, sans moyen de défense.

 

Vingt mètres devant nous, je vis les Rude­va­lois qui contour­naient la mai­rie. Pen­dant quelques secondes, celle-ci fut prise entre deux feux, les Rude­va­lois tirant par der­rière tan­dis que nous envoyions de la place toutes nos muni­tions. Puis, les tirs ces­sèrent du bâti­ment et, peu après, des rues.

Cer­tains entrèrent dans la mai­rie. Les mili­taires avaient été tués, au rez-de-chaus­sée comme dans les appartements.

Deux rues plus loin, vers l’Ouest, les com­bats conti­nuaient. Les Chas­lois avaient atta­qué une ancienne auberge où les sol­dats avaient pris leurs quartiers.

 

Il n’y eut pas de réunion. Je rejoi­gnais juste mon groupe lorsque Claude repar­tit vers les coups de feu ; et l’on sui­vit aveu­glé­ment. On cou­rut de nou­veau, sans prendre le temps de souf­fler, pour prendre l’au­berge à revers.

Mon deuxième char­geur fut vide à son tour. Je n’é­tais plus sur la place. Un recoin de rue m’a­bri­ta pen­dant que je rechargeais.

Puis, je repar­tis à l’as­saut sans y penser.

Une balle frap­pa le sol, à un mètre de moi. Je plon­geai de coté et me mou­lai dans un mur pour y disparaître.

Marie arri­va à coté de moi.

– Il y a un tireur caché quelque part par là, lui dis-je avec un geste dési­gnant l’ar­rière du mur.

– J’ai vu un type prendre une balle qui venait de là, confirma-t-elle.

 

Je me redres­sai un peu. Toute peur avait dis­pa­ru. D’un coup d’oeil rapide, je vis le clo­cher ; un fusil en dépassait.

Mona arri­va, sui­vie de sa mère.

– Il y a un sni­per dans le clo­cher, dit Régine. Ça fait au moins cinq per­sonnes qu’il descend.

Marie par­tit le long du mur. Elle se glis­sa dans un bâti­ment, nous fai­sant signe de la suivre.

Nous tra­ver­sâmes la mai­son pour sor­tir par une fenêtre, hors de vue du clocher.

Là, c’é­tait une paix irréelle qui régnait. Les fenêtres étaient fer­mées mais, à l’in­té­rieur des mai­sons, tout était res­té comme lors du départ de leurs habi­tants. Des touffes de pis­sen­lits pous­saient au pied des murs et un pot de géra­niums conti­nuait à fleurir.

Puis on repar­tit vers le Nord, vers le clo­cher, par cette ruelle paral­lèle à celle qui mon­tait à l’é­glise. Aux aguets quand même.

– On est à la hau­teur de la place de l’é­glise, fit remar­quer Régine.

Marie cas­sa une fenêtre à l’aide de son fusil, et ren­tra dans une maison.

Une mai­son propre, ran­gée, où seule une couche de pous­sière annon­çait la cou­leur : elle avait dû être déser­tée depuis plus d’un mois.

Des boîtes de conserve trô­naient sur une éta­gère et, ins­tinc­ti­ve­ment, je notai l’emplacement de ce garde-manger.

De l’autre coté, juste en face de l’é­glise, une porte en chêne mas­sif et deux fenêtres sans rideaux ouvraient sur la place. Nous étions trop bas : il n’y avait aucun angle de tir sur le clocher.

En revanche, en sor­tant, nous allions faire de très belles cibles pour le tireur.

– Marc, Mona, vous fon­cez le long de l’é­glise pour ren­trer par le tran­sept. Marie, on arrose autant qu’on peut pour évi­ter que le type de là-haut ait envie de sor­tir son nez pour les descendre.

L’i­dée de Régine fut adop­tée sans dis­cus­sion. Et, tan­dis qu’elle et Marie visaient le clo­cher de leurs tirs, Mona et moi cou­rûmes pour nous glis­ser le long de l’é­glise. Une petite porte per­met­tait d’en­trer par le tran­sept, à la base du bras.

La porte n’é­tait fer­mée que par la rouille des gonds. Elle s’ou­vrit dans un grin­ce­ment et nous plon­geâmes der­rière un pilier de la croisée.

Une cloche son­na au-des­sus de nous. Sans doute une des balles de Régine ou de Marie avait-elle rebon­di sur le lin­teau pour venir la frapper.

Nous mon­tâmes par un esca­lier et Mona souffla :

– C’est la pre­mière fois que j’entre dans une église.

Je lui fis signe de se taire, et nous arri­vâmes au pied du clo­cher, dans un esca­lier en colimaçon.

Pas à pas, nous avan­cions, fusil à la main ; mais un bruit de caval­cade nous arrê­ta, et un homme en uni­forme se jeta sur nous dans sa des­cente. Mona tira par réflexe, et il m’en­traî­na dans sa chute ; nous nous arrê­tâmes à peine plus bas, après avoir rou­lé aux pieds de Mona.

J’é­tais tête en bas, et je ten­tai de me rele­ver lorsque j’en­ten­dis un deuxième coup de feu. Un seconde plus tard, un choc bru­tal m’ar­ri­va der­rière la tête et je don­nai un violent coup de men­ton à une marche. Je rou­lai encore deux marches avant d’ar­ri­ver à me retourner.

Mona avait dis­pa­ru et, bru­ta­le­ment, la panique me reprit. Il y avait un corps un peu plus bas, un autre sur moi. Je sen­tais le sang cou­ler de mon men­ton sur ma joue et je me remis à pleurer.

– J’en ai marre, gémis­sais-je. J’en ai marre. Lâche-moi, toi, j’en ai marre…

Je repous­sai enfin le corps qui m’é­cra­sait et com­men­çai à ram­per à la des­cente, par-des­sus le deuxième.

En bas de l’es­ca­lier, je m’arrêtai.

– J’en ai marre… J’ai mal… J’en ai marre… Je joue plus. Là, je joue plus…

Je san­glo­tais, assis au bas de l’es­ca­lier, me tenant le men­ton avec ma main et regar­dant les gouttes qui cou­laient sur mon t‑shirt.

 

Mona fut devant moi.

– Ça va pas ?

Je rele­vai la tête. Elle était accrou­pie devant moi, et elle posa sa main sur mon épaule.

– Il y en avait deux. Je crois que le deuxième t’a rou­lé dessus.

Elle mit bas son sac à dos et sor­tit une petite trousse ; un peu de coton, du Mercryl.

– Retire ta main…

Je conti­nuai à san­glo­ter tan­dis qu’elle me tam­pon­nait le menton.

– T’a eu de la chance, crut-elle bon d’a­jou­ter, la mâchoire n’est pas cas­sée et tu as toutes tes dents.

Je ne rele­vai pas. J’é­tais trop las.

– Là, c’est bon, reprit-elle en col­lant le coton sur mon men­ton avec un bout d’adhésif.

Elle se rele­va et me regarda.

– On y retourne.

Je res­tai assis.

– J’en ai marre. Je suis bien, là. Pour­quoi je res­te­rais pas là en atten­dant que toute cette merde soit finie ?

Elle s’ac­crou­pit de nou­veau, posa sa main gauche sur mon épaule droite.

– Parce que c’est pas là que ça se passe. Ça n’est pas que toi ou moi. Il y a aus­si les autres. Papa, Maman, Anne, Marie, Yoru… Il n’y a pas que nous.

Elle me fixa un temps dans les yeux, et reprit :

– T’es peut-être pas un homme d’ac­tion, mais t’as tou­jours eu des idées. Me dis pas que t’as renon­cé ? T’as oublié ? T’a­vais des idées, dans le temps.

– Et je dois mou­rir pour mes idées ?

– S’il le faut, pour­quoi pas ? Il faut bien mou­rir de quelque chose, non ?

Je remar­quai à peine cette phrase qui était, pour­tant, une des “devises” que je sor­tais régu­liè­re­ment — à chaque fois que je devais prendre le volant sous une pluie bat­tante, à chaque fois que je devais mon­ter un che­val dif­fi­cile, à chaque fois que je ten­tais de battre mon record d’a­pnée à la pis­cine, à chaque fois que je devais boire un vin local… “Il faut bien mou­rir de quelque chose !”

 

Régine et Marie entrèrent dans l’é­glise par le portail.

– Bles­sé ?, deman­da Marie.

– Cre­vé, répon­dit Mona. Il est tom­bé avec le pre­mier sni­per et s’est pris le deuxième sur la gueule. Il craque, c’est tout.

Régine me regar­da et mur­mu­ra juste :

– C’est bien son tour.

 

Elles res­tèrent là, atten­dant que je me relève. Alors, dans un effort déme­su­ré, je me redres­sai le long du mur, glis­sant peu à peu comme un serpent.

– Ça ira ?

– Il fau­dra bien.

Je fis un pas chan­ce­lant. Le deuxième fut plus assu­ré, puis la machine se remit en route. Nous sor­tîmes de l’église.

Plus bas, tout était fini. Le vil­lage était tom­bé. Des corps en uni­formes gisaient çà et là, mêlés aux civils sans dis­tinc­tion. La mort ne fait pas de différence.

Après avoir réa­li­sé qu’ils ne tien­draient pas, les offi­ciers étaient par­tis en empor­tant pri­son­niers les vil­la­geois qui res­taient. Ils avaient éga­le­ment incen­dié la par­tie du vil­lage qu’ils tenaient encore et le feu se pro­pa­geait len­te­ment, mais sûre­ment, aux autres maisons.

 

Il était plus de onze heures. Nous man­geâmes un peu, puis nous com­men­çâmes à ras­sem­bler les corps.

Vers midi, un bruit de moteur nous inter­rom­pit. Une jeep redes­cen­dait après sa patrouille dans les hauteurs.

Deux groupes se pos­tèrent à l’en­trée du vil­lage. Il y eut des rafales, quelques secondes de bagarre, et tout ren­tra dans l’ordre.

Dans l’a­près-midi, des maqui­sards par­tirent en patrouille. Ils croi­sèrent des mili­taires dis­per­sés qui, suite à l’at­taque et en l’ab­sence d’ordres, n’a­vaient pas osé reve­nir dans la nasse.

Nous repar­tîmes à la mon­tée vers Char­vest. Ce fut le début d’une longue traque, à la recherche des sol­dats qui avaient échap­pé à l’attaque.

Nous tenions le vil­lage et, même en tout-ter­rain, il était impos­sible à ceux qui patrouillaient dans les hau­teurs de res­sor­tir de Bou­quet sans y passer.

Nous vîmes cer­tains ten­ter de for­cer le pas­sage. D’autres furent cap­tu­rés ou abat­tus dans la mon­tagne en ten­tant de rejoindre à pied le Rude­val, Léhault ou Les Mards.

 

On ne ren­tra fina­le­ment sur Char­vest que le len­de­main, en fin de mati­née. Nous avions pas­sé la nuit à mar­cher dans la mon­tagne en cher­chant les sol­dats fuyards.

 

Trois jours plus tard, quelques nou­veaux maqui­sards arri­vèrent. Les pri­son­niers empor­tés par les offi­ciers avaient été jugés ; le maire avait été condam­né à mort pour avoir aidé des ter­ro­ristes. Les habi­tants de Bou­quet et des Mards qui n’a­vaient pas déjà fui pre­naient à leur tour la montagne.

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