Traductions

Ceux qui suivent auront devi­né que je me suis récem­ment fait tous les épi­sodes dis­po­nibles de Star­gate : Uni­verse. Et cette semaine, j’ai repris un autre style de séries auquel je suis plus accou­tu­mé ces der­nières années, en me met­tant à jour de The Big bang theo­ry et How I met your mother, et en com­men­çant Cali­for­ni­ca­tion (qui est tom­bée dans une conver­sa­tion récente et dont je me suis ren­du compte que j’en avais jamais vu un épi­sode com­plet, ne l’ayant qu’ac­ci­den­tel­le­ment croi­sée un soir sur M6 et n’ayant alors pas du tout accroché).

Il y a bien sûr des points com­muns évi­dents entre ces séries : le côté comé­die cynique, l’hu­mour noir, le roman­tisme latent, le for­mat court aus­si. Mais sur­tout, ce sont trois séries épou­van­ta­ble­ment intel­los, bour­rées de réfé­rences lit­té­raires, ciné­ma­to­gra­phiques ou artis­tiques au sens large, un peu comme Six pieds sous terre (un de mes gros coups de cœur 2009) qui pous­sait le vice jus­qu’à citer Freud.

Or, il y a une chose qui m’a frap­pé en enchaî­nant SG:Universe avec les autres : la qua­li­té des sous-titres.

Il faut pré­ci­ser que, sans être un inté­griste de la VO, j’ai décou­vert que dans cer­tains cas le dou­blage suf­fit à faire fuir une série ou un film. J’ai vu une fois un épi­sode de How I met your mother en fran­çais, et c’é­tait juste à chier : calage approxi­ma­tif, lour­deur de la tra­duc­tion, contre-into­na­tions… Idem pour Dex­ter, dont une par­tie du charme repose sur la fausse neu­tra­li­té de la nar­ra­tion de Michael Hall, pas aus­si bien ren­due en fran­çais, et je me suis aper­çu aujourd’­hui qu’en démar­rant Cali­for­ni­ca­tion par les pre­miers et avec la voix de Duchov­ny, ça passe beau­coup plus mieux.

L’ex­cep­tion, ça serait peut-être Mal­colm, dont le dou­blage est pro­pre­ment excellent et dont la ver­sion fran­çaise est aus­si hila­rante et déjan­tée que l’a­mé­ri­caine, même si l’on découvre encore des trucs dans celle-ci.

Mais sur­tout, le gros argu­ment en faveur de la ver­sion ori­gi­nale, c’est le temps. Je sais, c’est pas bien, mais attendre six mois pour voir arri­ver en France des dou­blages impro­bables, c’est chiant, quand tous les maniaques qui m’en­tourent regardent les séries au fur et à mesure de leur sor­tie — au pas­sage, les ayants droit feraient bien de les pro­po­ser en vidéo à la demande, pour l’en­semble de la pla­nète, dès le len­de­main de leur dif­fu­sion à la télé, ça leur don­ne­rait une chance de pas voir leurs fans se tour­ner vers la pira­te­rie : un fan, ça n’aime pas attendre six mois pour un DVD.

Tout ça donc pour en venir à la qua­li­té des sous-titres.

Ceux-ci sont géné­ra­le­ment réa­li­sés par des fans, qui veulent par­ta­ger leur fani­tude avec des gens moins doués qu’eux en anglais. Au pas­sage, c’est une autre atteinte au droit d’au­teur, mais là encore si les pro­duc­teurs se bou­geaient le cul ils pour­raient eux-mêmes faire tra­duire les séries pen­dant la pro­duc­tion et pro­po­ser eux-mêmes des solu­tions à leurs fans les plus pressés.

Et j’ai remar­qué que les sous-titres de Star­gate sont, en deux mots, à chier. Vrai­ment. À croire que les types qui les ont fait avaient Google Trans­late comme prin­ci­pal outil, et se sont conten­tés d’y pas­ser les sous-titres pour mal­en­ten­dants de la ver­sion anglaise : des gros pans de dia­logues sont com­plè­te­ment anéan­tis par des expres­sions idio­ma­tiques tra­duites mot à mot, au point que fran­che­ment, même si vous n’a­vez qu’une com­pré­hen­sion limi­tée de l’an­glais, je vous conseille la ver­sion sans sous-titres (mal­gré l’ac­cent écos­sais redou­table de Car­lyle, qui sur­prend un peu quand on a pas l’ha­bi­tude des r rou­lés). Et je ne parle même pas des fautes d’or­tho­graphe, qui prouvent tou­te­fois l’in­ter­ven­tion humaine — jamais Google ne ferait une erreur comme confondre côte et cote.

À l’autre bout de la chaîne, je vous conseille sans réserve les sous-titres des fans de How I met your mother. Jeux de mots intra­dui­sibles rem­pla­cés par d’autres, réfé­rences amé­ri­caines adap­tées à leur équi­valent fran­çais, il y a là du très beau bou­lot que, si j’é­tais le pro­duc­teur des DVD fran­çais, je n’hé­si­te­rais pas à reprendre et rému­né­rer plu­tôt que de le faire refaire par des tra­duc­teurs certes pro­fes­sion­nels, mais qui ne connaî­traient pas sur le bout des doigts l’u­ni­vers de la série.

Et là, je me dis que ça ne peut pas être un hasard. La série issue d’un uni­vers d’ac­tion et d’a­ven­tures à rebon­dis­se­ments est “tra­duite” par un type qui n’a jamais ouvert un dico et n’a qu’une com­pré­hen­sion limi­tée de l’an­glais ; celles sur les dérives sen­ti­men­ta­lo-humo­ris­tiques de tren­te­naires dépres­sifs et culti­vés est adap­tée par un gusse qui com­prend les jeux de mots anglais et se creuse le chou pour pro­po­ser des plai­san­te­ries ana­logues en français.

Ça confirme en tout cas une chose : toutes les séries n’ont pas le même public. Et ça confirme aus­si, sans doute, que Star­gate : Uni­verse va souf­frir d’un posi­tion­ne­ment le cul entre deux chaises : ses audi­teurs aiment plus les biceps que les cer­veaux, ce qui pré­sage mal pour une série psy­cho­lo­gique, cloî­trée et introspective.