Flying blues chez Air France
|Depuis la mi-janvier, je me bats avec le service clients d’Air France — ou plus exactement de son programme de fidélité, Flying Blue. Mes différents échanges avec eux, disons plutôt mes différentes tentatives d’échanges, étant apparemment définitivement vouées à l’échec (rappel : depuis mi-janvier, ça fait près de trois mois), j’ai décidé de le raconter, dans l’espoir naïf que cela puisse éviter ce genre de déconvenue à d’autres et/ou faire réagir la compagnie.
Tout commence en décembre. Air France annonce que le vol AF439 (Mexico-Paris) du 11 janvier 2016 serait le dernier vol en service régulier de passagers assuré sur Boeing 747. C’est une page d’histoire qui se tourne : la compagnie utilisait l’appareil depuis 1970 (même si les 747–100 d’alors n’avaient que peu d’éléments communs avec les 747–400 qui ont écrit le dernier chapitre).
Pour marquer la fin de cette longue et belle histoire d’amour, Air France propose un dernier vol charter, un tour de France en 747, qui aura lieu le 14 janvier dans l’après-midi et sera logiquement baptisé AF747. 400 places, à quelque chose près, et… 30 000 demandes ! Le standard a sauté, il y a plusieurs dizaines de minutes d’attente, tout est parti en un instant. Devant l’affluence, Air France fait un geste : un deuxième vol est programmé pour la matinée, sur le même itinéraire, baptisé AF744 (l’abréviation usuelle du Boeing 747–400 est B744). Mon pote Frédéric saute sur ses téléphones sitôt les ventes lancées, il a du bol : il arrive en tête de liste d’attente et en fin de matinée, on nous confirme que nous avons des places.
Le 14 janvier, nous nous retrouvons donc à gare du Nord pour prendre le RER de 6 h 45. Comment rendre des journalistes heureux de se lever tôt ? Air France a trouvé. On fait imprimer nos cartes d’embarquement, qui sont en fait un aller-retour virtuel vers la ville de Fictitious (je suppose que le système ne sait pas gérer un vol qui se pose là où il a décollé), on fait tiquer tous les agents de sécurité (“le vol pour Paris-Charles de Gaulle, c’est là ?” marche aussi bien que “le vol pour Fictitious, s’il vous plaît ?”), le tour de France se déroule admirablement bien sauf pour les PNC qui n’ont sans doute jamais eu quatre centaines de passagers aussi remuants, et quand le commandant annonce qu’il y a une suspension des atterrissages à Roissy et qu’on va faire deux petits tours d’attente et arriver avec 1/2 h de retard, tout le monde applaudit. Bref, une belle opération totalement réussie, comme en a témoigné Fred.
C’est ensuite que tout se complique.
17 janvier : problème technique
Comme d’habitude, je n’ai pas passé ma carte de fidélité Flying Blue en éditant ma carte d’embarquement. Donc, comme d’habitude, je vais sur le site Flying Blue pour récupérer les miles correspondants et proroger la validité de ceux déjà stockés. Le site m’indique qu’un problème technique est survenu. Pas grave, je réessaie quelques jours plus tard, j’ai à nouveau un problème technique ; j’essaie avec un autre navigateur, depuis une autre connexion à Internet, même chose. Du coup, j’envoie un message sur le site de Flying Blue en leur indiquant ce qu’il se passe.
Le 26 février, n’ayant toujours pas eu de réponse, je réessaie de demander mes miles sur le site. Toujours le même problème technique, donc je renvoie un message, signalant que j’ai toujours un problème technique pour faire enregistrer le vol AF744 sur mon compte.
27 février : “nous vous rappelons que”
Le lendemain, réponse.
Moi, je veux bien qu’on me rappelle des choses, mais ça supposerait qu’on me les ai déjà dites. Or, je n’en ai aucun souvenir. Au contraire, je me souviens m’être dit “c’est cool, ça prorogera la validité de mes miles, vu que j’ai pas volé dans une compagnie Flying Blue depuis presque un an”, donc si j’avais vu passer une mention du genre “ce vol n’est pas éligible au programme de fidélité”, je l’aurais noté.
Je fouille donc dans les archives, à la recherche d’un endroit où Air France m’aurait indiqué que ce vol ne permettait pas l’accumulation de miles.
Et là, je tombe sur le mail de confirmation du billet, reçu le 17 décembre à 11:41 :
Voilà, elle est là, la seule mention de Flying Blue dans les infos que j’ai reçues : “Profitez du programme Flying Blue”.
Et on me dit qu’on me “rappelle” que le vol ne permet pas l’accumulation de miles ?!!!
Vous vous en doutez : cette réponse ne me satisfait pas. Vous avez lu comme moi que “si vous désirez répondre à cet email, cliquez sur le lien ci-dessous” ; je clique donc, et compose la réponse suivante :
Mars : la grande muette
Le 7 mars, n’ayant pas reçu de réponse, je renvoie un message via le lien “Répondre”, toujours en prenant soin de laisser les références.
Le 23, après avoir vérifié mon dossier “spam” et constaté l’absence renouvelée de toute réponse, je deviens un peu plus sec : mon troisième mail se contente de :
Bonjour,
Combien de relances dois-je envoyer pour avoir des précisions sur votre réponse ?
Merci d’avance et bonne journée.
Le 27, j’envoie un quatrième mail.
Aucun de ceux-ci n’ayant eu de réponse, je retourne sur le site d’Air France pour déposer une nouvelle réclamation. Nous sommes le 29 mars, et j’explique chercher à joindre le service depuis près d’un mois sans avoir aucun signe de vie.
31 mars : bottage en touche
Pour boucler le mois en beauté, je reçois enfin quelque chose :
Le service clients d’Air France renvoie donc la balle à son homologue de Flying Blue.
Aujourd’hui, une semaine plus tard, je n’ai bien entendu reçu aucune réponse de celui-ci.
Conclusion (temporaire ?)
Que faire dans cette situation ? Continuer à envoyer des messages dans le vent ?
Ma question est pourtant simple : si le service client “me rappelle” que ce vol n’était pas éligible, c’est que cela m’a déjà été indiqué. Donc : où et quand ? La réponse à cette question n’est quand même pas difficile à trouver, et si cette information ne m’a pas été transmise, il n’est pas compliqué de s’en rendre compte.
Savoir s’il est trompeur de mettre un placard “profitez du programme Flying Blue” dans une confirmation qui n’y donne pas droit est une autre question, que je n’ai pas posée pour l’instant, mais j’envisage très sérieusement de contacter 60 millions de consommateurs pour savoir ce qu’ils en pensent.
En tout cas, le service client a bien mon adresse dans sa base : le premier mars, il m’a envoyé un autre courriel.
Bien entendu, le formulaire permettant de donner mon avis sur le service Flying Blue est beaucoup trop court pour me permettre d’expliquer ce que j’en pense.
Mais si vraiment je dois résumer mon expérience : “absolument désastreux” me semble une bonne accroche.
Je note en passant qu’en anglais, l’expression “I’m blue” signifie “je suis triste / mélancolique”. Du coup, on pourrait traduire “I’m flying blue” par “je suis las de voler”. Je ne pensais pas que ce programme était si bien nommé.
Conclusion définitive
Après avoir fait suivre cet article sur les pages Twitter et Facebook d’Air France, j’ai enfin pu avoir un interlocuteur efficace.
Il ressort d’une part qu’effectivement, aucun avertissement spécifique sur la non-éligibilité de ce vol au programme de fidélité n’avait été envoyé (ouf, je ne suis pas encore complètement gâteux) et, d’autre part, que l’encart Flying Blue sur la confirmation du billet est un pavé promotionnel ajouté automatiquement. Mon interlocuteur a reconnu que “l’expression ‘Nous vous rappelons’ dans notre message était quelque peu malheureuse”.
Air France indique avoir systématiquement répondu à mes demandes, une fois par téléphone, les autres fois par mail. Virgin ayant réinitialisé mon répondeur lors du rapatriement sur le réseau SFR, il est possible que le message laissé sur mon téléphone soit passé à la trappe (je ne consulte pas ma boîte très assidûment), mais cela ferait trois ou quatre mails que je n’aurais pas reçus ; c’est beaucoup, mais malheureusement possible, le protocole des courriers électroniques n’intégrant aucune garantie de délivrance.
Au passage, la validité de mes miles a été prolongée. Ce n’était pas ma demande initiale (qui portait sur “où ai-je été prévenu ?”), mais c’est toujours agréable.
Merci donc aux gens qui gèrent le Facebook d’Air France, je rêverais que le service en ligne soit aussi réactif et efficace, sans avoir à mettre nos questions en public !