Joyeux anniversaire
|Il était le dernier-né d’une très, très grande famille : ses treize frères aînés avaient eux-même été précédés d’une grosse trentaine de cousins plus ou moins éloignés. On y trouvait tous les corps de métiers : beaucoup de reporters, des aventuriers, des policiers, des clowns, des astronautes, des pilotes et même des garçons d’hôtel. Ses pères avaient observé que leurs derniers enfants étaient plus sérieux que leurs aînés ; destinant leur quatorzième à une carrière de cobaye, ils changèrent radicalement de méthodes éducatives. Fini le langage puéril, les “popo”, les “gouzi-gouzi”, les jeux d’enfant, les surnoms idiots et les câlins-tout-va-bien : leur bébé apprit à parler correctement, découvrit tout jeune la noirceur du monde et reçut une éducation à la dure, passant le plus clair de son temps dans la pluie grise de la capitale.
Plutôt bien accueilli malgré son caractère un peu brutal, il convainquit ses parents d’avoir un nouvel enfant, en reprenant un peu de l’éducation en douceur des aînés sans abandonner le moderne réalisme du cadet. Las, malgré une première échographie prometteuse, les patriarches imposèrent l’avortement : le plus grand, mais aussi le plus dur enfant du couple resta donc leur dernier.
Joyeux anniversaire, Machine qui rêve.