Samedi 20 mars, réveil au petit jour — on n’est qu’au début du printemps et le Soleil reste encore bas sur l’horizon.
Le Soleil sort juste derrière l’église, et la vitre est couverte d’une épaisse buée : il doit pas faire chaud dehors. Petit déjeuner copieux : la pension propose moult variétés de pains et biscuits plus ou moins croquants, plus ou moins épicés, plus ou moins céréalisés ; des fromages, des jus de fruits (sans doute importés : la latitude permet difficilement la culture d’oranges et de pommes, hors de quelques rares serres…), des confitures, etc., en libre service.
Direction le Perlan, assemblage de réservoirs d’eau à l’est de l’aérodrome de Reykjavík, qui abrite un musée, un restaurant panoramique, etc.
À l’extérieur, des statues d’art moderne, consumées de l’intérieur en quelque sorte, fantômes de Nagasaki ou autres, difficile de savoir.
À l’intérieur, entre les citernes, un geyser souffle à intervalles réguliers à une dizaine de mètres de hauteur. Il y a quatre étages à monter pour arriver au restaurant panoramique, fermé bien entendu (c’est pas la saison des touristes).
On peut en revanche sortir sur le chemin de ronde. Le restaurant est dans une demi-sphère vitrée, et son plancher peut tourner pour que les convives voient différents panoramas au fil de leur repas. En se retournant au nord, on surplombe la ville…
…l’occasion de voir qu’il y a tout de même quelques immeubles citadins comme par chez nous, mais surtout beaucoup de maisons individuelles : l’Islande n’est pas encore surpeuplée et le chauffage n’y coûte pas cher (en schématisant, il suffit de planter un tuyau dans le sol pour avoir de l’eau chaude).
On repart vers le sud. Le sol fume çà et là, avec des piscines rigoureusement interdites (elles semblent plus adaptées à la cuisson du homard qu’à la baignade) et un geyser artificiel qui explique comment ça marche, ces trucs-là — en gros, il s’agit de faire bouillir le fond d’une colonne d’eau : lorsqu’elle se vaporise, à largement plus de 100 °C du fait de la pression, elle prend rapidement du volume et fait brutalement remonter la colonne avant de jaillir à la surface ; la colonne ayant disparu, la pression au fond chute d’un coup, et l’ensemble de la flotte se vaporise simultanément et ça gicle encore plus.
Au bord de la mer, on trouve un bassin d’eau chaude. De temps en temps, un Islandais plus réchauffé que les autres sort (notons qu’il doit faire 5 °C dehors et qu’il y a une petite brise vivifiante)…
…et va plonger dans le lagon à côté, où l’eau de mer doit être à la même température que l’air. Je crains pas spécialement l’eau froide, mais là, je dis respect. Oo
On remonte vers le nord, direction le Húsdýragarðurinn, un parc zoologique en plein Reykjavík.
Bassin des phoques près de l’entrée, tiens, je pensais qu’il y aurait du phoque du Groenland, mais en fait cette espèce n’est apparemment présente qu’à l’extrême nord de l’Islande, et ici on trouve du phoque gris — comme en Bretagne, tout à fait.
Plus loin, divers animaux de ferme : vaches, cochons…
…chevaux (avec petites filles qui leur filent des touffes d’herbe, les gosses sont les mêmes partout). Et puis, des rennes planqués dans un bosquet au milieu de leur parc dont j’aurai pas une photo correcte — je manque de zoom, que ce soit avec le FT2 ou avec le PL1 et son 14–42 mm.
Dans un petit bâtiment, des sortes de furets qui dorment comme des loirs sous un éclairage rougeâtre impropre aux photos (ils ne se réveillent qu’un peu plus tard dans la saison), sous un panneau interdisant le flash (encore heureux). Je me dis a posteriori que j’ai été très con : certes, les fiches signalétiques en islandais étaient assez peu informatives pour mes maigres connaissances de la langue (limitées en gros à “takk” et “halló”), mais il devait bien y avoir un nom latin quelque part qui m’aurait indiqué ce qu’est cette bestiole.
Mise à jour : ma mère a été plus attentive et m’indique que c’est un vison (mustela lutreola). Elle en avait également trouvé un crâne en route, et à comparer avec un crâne de blaireau qu’on a chez nous depuis des lustres, ben y’a un sacré air de famille — à l’échelle près, le blaireau est facile deux fois plus gros.
Enfin, un couple de renards polaires, un peu cabots, qui trottent devant les visiteurs et prennent la pose de temps en temps. C’est plus petit qu’un renard roux — en fait, j’ai connu des chats plus gros que ça, un peu obèses quand même — mais l’air de famille est évident.
Ensuite, on marche un peu, on traverse les anciens lavoirs de la ville, larges bassins désormais à sec où l’eau arrivait directement bouillante et où l’on trouve désormais un petit abri dans le plus pur style Syndicat d’initiative de la Drôme, avec photos d’époque et explications en anglais.
Enfin, on arrive à la piscine. J’obéis au panneau qui interdit les appareils photo (le test aquatique du FT2 sera pour plus tard), ma mère d’un côté, moi de l’autre. Arrivée aux douches, panneau en islandais et en anglais (pour ceux qui n’auraient pas compris le très explicite maillot de bain dans un stationnement interdit) expliquant que la douche se prend obligatoirement à poil avec savonnage soigné des endroits stratégiques. Petite seconde de surprise — en bon parigot, je suis habitué aux “maillot obligatoire à tout moment” —, mais en fait c’est bien plus hygiénique. Faut quand même mettre le maillot avant d’arriver dans la zone mixte (c’est quoi cette discrimination anti-hétéro, où seuls les homos peuvent se rincer l’œil ?), mais comme les Islandais sont des gens propres et qu’ils viennent de se laver comme il faut, on se baigne sans bonnet et c’est quand même propre. Rien à voir avec les piscines françaises, saturées de chlore pour tenter de limiter la toxicité ambiante et dégueulasses puisqu’on met des Français dedans (on se dit des fois que la combinaison étanche devrait y être obligatoire)…
Une fois dans l’eau, ça se confirme : elle est non seulement propre, mais non chlorée (merci pour les yeux et les poumons). Et c’est gigantesque : un bassin couvert de 25 m, un bassin découvert de 50 m qui doit être à 28 °C (rappelons qu’il fait 5 °C dehors, mais que l’eau chaude n’est pas chère) et un lagon presque aussi grand et un poil plus chaud. Sans compter les pots d’eau chaude, dont la température est régulée de deux degrés en deux degrés, une pataugeoire de trente centimètres de profondeur à environ 35 °C, et un toboggan dont la tour d’accès est abritée du vent et dont on ne se lasse pas. Passer là-dedans après les piscines parisiennes, c’est un peu comme passer du Bar des Sports à un pub irlandais ou de la station du col de Rousset à celle de Saint-Moritz.
Bon sang, s’il faut une raison pour aller en Islande, les piscines en sont une suffisante.
Plus tard, retour tranquille…
…un verre dans un pub Guinness à la déco très sympa, repas dans un restaurant brésilien — bouffe très bonne, ambiance un peu bruyante, prix fort raisonnables…
…et retour à la pension, l’église n’a pas bougé mais c’est encore plus marquant de nuit. Oo