Je rêve de m’arrêter d’écrire,
Lever les yeux de mon clavier,
Poser mon stylo et m’enfuir.
J’embarquerais sur un voilier,
M’offrirais au pied des rochers
Une sieste, perdu dans les calanques,
Sans rien noter ni recopier,
Suivant l’envie de jeter l’encre.
L’oisiveté ne peut suffire
À me nourrir et me loger,
Et ma conscience, pour le pire,
M’interdit toujours de bâcler.
Pour oublier un temps mon faix,
Je voudrais me muer en cancre
Mais continue à rédiger
Malgré l’envie de jeter l’encre.
L’un a entendu mes soupirs
Et par la rage, a répliqué ;
L’homme qui hurle me fait vomir
S’il croit ainsi me motiver !
L’autre, qui prétend me dominer,
A l’effet d’un jus de cynanque ;
Le tiers veut me voir composer
Quand j’ai l’envie de jeter l’encre.
“Prince, pour vivre, tu dois trimer.”
Ce dogme chrétien, devenu chancre
De notre absurde société,
Nourrit l’envie de jeter l’encre.
(02/15)