Nouveau 3 — Nvidia 1
|Vous le savez peut-être : il y a deux grandes politiques opposées, quand on est fabricant de matériel informatique, vis-à-vis des systèmes d’exploitation les moins répandus.
En fait, trois, si on compte les “prenez Windows ou Mac OS X et venez pas me faire chier”, qui n’est à mon humble avis pas une politique acceptable.
Il y a d’un côté les constructeurs qui fournissent les spécifications de leurs produits pour permettre aux utilisateurs de développer eux-mêmes les pilotes nécessaires, ou qui participent au développement de pilotes libres.
Et de l’autre, ceux qui développent en interne des pilotes privés, gardant jalousement leurs secrets de fabrication.
Cette dichotomie touche notamment les constructeurs de cartes graphiques : d’un côté, Intel et AMD (maison-mère d’ATI), qui fournissent les specs, permettant à n’importe quel programmeur compétent de créer des pilotes utilisables sous la licence de son choix. Le résultat, c’est que les cartes Intel et ATI sont reconnues directement avec l’accélération 3D sur la plupart des systèmes d’exploitation libres, notamment GNU/Linux qui est l’OS que j’utilise habituellement (dans sa variante Ubuntu Natty, ces temps-ci). Au passage, notons que ATI propose également des pilotes propriétaires, censés être plus performants.
De l’autre, Nvidia, qui ne fournit aucune information aux programmeurs tiers et propose un pilote propriétaire. Celui-ci est performant en matière d’accélération 3D, mais souffre de plusieurs limitations, en particulier pour la gestion du multi-écrans. Ça ne me gêne pas (mes deux écrans sont à l’horizontale et n’appliquer qu’un profil à la fois ne me traumatise pas), mais avec le passage à Natty j’ai noté quelques petits bugs d’affichage.
Vendredi, en arrivant chez mes parents, la coupe est pleine : le pilote Nvidia a conservé la trace de ma configuration domestique, avec un Samsung F3280M à gauche de mon portable, et n’a pas été fichu de détecter qu’il n’y a plus que l’écran du portable. Le problème, c’est que du coup les panneaux Gnome s’affichent dans le vide, de même que les fenêtres que j’ouvre.
Après avoir modifié le xorg.conf en mode console et redémarré GDM, j’ai pu retrouver mon bureau sur un seul écran. Mais bon, plein le cul de ces conneries, il paraît que le projet Nouveau atteint un niveau de fiabilité correct même en 3D (malgré un développement entièrement fait par rétro-ingénierie, mutisme de Nvidia oblige), c’est peut-être le moment de les essayer.
Étape 1 : supprimer les pilotes Nvidia et installer la version expérimentale des pilotes Nouveau, avec le support de Gallium 3D.
Étape 2 : rebooter et regarder si ça marche.
Première chose : oui, ça marche. Compiz est content, j’ai bien de la 3D, youpi.
Deuxième chose : un seul programme n’est pas content, c’est Google Earth. Il me dit que là, niveau perfs, c’est vraiment pas terrible, et affiche genre cinq images par seconde, ce qu’en bon français on appelle “saccader comme un goret”. Précisons que j’ai pas de jeux 3D sur mon poste, je présume qu’eux aussi pourraient se plaindre des performances graphiques.
Troisième chose : pour le reste… tout va bien. Vraiment.
Au point que j’ai plusieurs bugs qui ont disparu, à commencer par les problèmes de Firefox : l’affichage de cette pub ne fait plus ralentir la machine ni saturer un cœur de processeur, et des petits problèmes avec la gestion de la transparence sur certains sites web (notamment Facebook et Sens Critique) ont également dégagé.
Autre bug chiant : je ne pouvais pas ouvrir deux sessions simultanément sur mon poste. En fait, je pouvais, mais un bug graphique me ruinait l’affichage lorsque je revenais sur la première session ouverte. Du coup, je fermais la session à chaque fois que je voulais changer d’utilisateur. Maintenant, le switch marche sans bug et je retrouve le caractère multi-utilisateurs OS Unix.
Ah, et bien sûr les outils de configuration compatibles RandR reconnaissent maintenant parfaitement les écrans connectés, ce qui devrait m’épargner les soucis d’écran fantôme en déplacement…
Au final, si je fais le bilan, les pilotes propriétaires Nvidia n’ont qu’un avantage : les performances. Pour le reste (compatibilité, bugs, multi-sessions), Nouveau les écrase.
Et les performances de Nouveau sont suffisantes pour mon utilisation quotidienne, donc pour l’instant je vais rester là-dessus en méditant sur la supériorité de l’Open Source.
Et sur l’incurie de Nvidia.