Mieux, c’est moins bien
|Comment proposer une interface claire, sympathique à l’œil et utile ? C’est un casse-tête permanent, sur lequel tout le monde n’est pas d’accord (sinon ça serait trop simple). Certains s’y fourvoient, à l’instar de l’équipe de Gnome Shell, d’autres y parviennent généralement bien, mais personne n’a de solution parfaite qui plaise à tout le monde.
Google, c’est un peu une boîte de geeks, on le sait depuis des lustres. Il suffit d’ailleurs de voir la population qui traîne sur Google+, l’ ”anti-Facebook” de la marque : à l’heure actuelle, à une poignée d’exceptions près (des attachées de presse qui surveillent leurs journalistes partout où elles peuvent), j’appellerais “geek” sans hésiter tout mes contacts G+ tandis que, aux mêmes exceptions près, mes contacts FB que je qualifierais de normaux (ou de tarés, mais d’une autre sorte de folie) ne sont à ma connaissance pas passés chez Larry et Sergey.
Du coup, Google a tendance à faire des interfaces de geeks : très pratiques, mais qui demandent de fouiller un peu et de savoir survoler les indications. Exemple avec l’agenda dans sa version classique :
Vous voyez ? Oui, y’a beaucoup d’infos. En fait, j’ai l’honneur de faire partie d’une boîte de geeks, qui travaille énormément avec l’agenda Google. Tout ce que vous voyez en rouge et orange, c’est le planning de publication et de présence des rédacteurs, et seul ce qui est en vert est mon agenda personnel (là, c’est des histoires de déménagement pour l’essentiel).
Oui, j’ai réduit l’image, parce que déjà c’est un plein écran Full HD et que donc c’est lourd, et parce que en plus je suis pas habilité à publier le planning des Numériques jusqu’à la fin du mois donc je fais en sorte que ça soit illisible.
Google ayant envie de bosser maintenant sur une image plus classe, l’agenda dispose d’une nouvelle version :
Vous voyez comme c’est beaucoup plus aéré ? Les cadres sont plus larges, y’a plus de place autour, on voit mieux ce qu’on voit… et y’a quasiment tous les jours un lien “3 de plus”, “5 de plus”, “6 de plus”, selon le nombre de cases masquées parce qu’il n’avait pas la place de tout mettre.
C’est, je crois, un bel exemple de régression. Le premier coup d’œil est flatteur, on se dit que c’est plus propre, et si on a cinq notes maximum par jour c’est réellement plus aéré et plus agréable ; mais pour ceux qui utilisent intensivement l’agenda, la nouvelle présentation n’est tout simplement pas assez dense. L’ancienne affichait jusqu’à 10 événements, et passait ensuite à 9 événements et un lien “2 de plus” ; la nouvelle est limitée à six événements.
J’avais une journée à 11 lignes (hier, en fait), mais pour toutes les autres, l’ancienne version m’affichait au premier coup d’œil un agenda complet — bordélique, mais complet ; pour la nouvelle, je n’ai que 14 jours sur 35 dont je peux voir le programme intégral.
Heureusement, Google permet de revenir à l’ancienne présentation. Il suffit de cliquer sur l’engrenage, puis de choisir “revenir à l’interface classique”. Faites comme moi, et peut-être Google bossera-t-elle sur une version dense de la nouvelle interface, qui permettrait d’avoir un truc plus élégant mais tout aussi bordélique, pardon, je voulais dire complet.
À l’inverse, certains bossent sur des interfaces réussies, avec succès. Tenez, je vous mets côte à côte un service que je maudis régulièrement et un nouveau que je viens de découvrir (merci Ghusse), en leur demandant mon trajet habituel :
À première vue, l’interface de droite paraît beaucoup plus attrayante et beaucoup plus épurée. On a aussi l’impression qu’il y a moins d’infos.
En fait, pas vraiment.
On peut tout de suite relancer une recherche dans le cadre du haut de Capitaine Train, comme dans celui de la colonne bleue chez Voyages-SNCF. On a pour chaque proposition les horaires de départ et d’arrivée, qui sont ceux qui nous intéressent ; la SNCF affiche directement les correspondances, mais le capitaine affiche une petite représentation graphique du voyage, avec des zones blanches pour le temps passé dans un train et des zones grises pour le temps passé en correspondance : finalement, on en sait quasiment autant, avec un truc plus visuel (et si moi, ça me gave de faire du calcul mental pour voir le temps d’attente, j’imagine que la plupart des gens doivent prendre des boutons) et aussi utile, et un clic permet d’avoir le détail (et de choisir directement sa place).
Il manque les petits logos pour la présence d’un bar, d’espace pour les enfants ou de porte-vélos, mais c’est assez anecdotique vu que ces services sont à peu près toujours les mêmes selon le type de train (tous les TGV ont un bar, aucun TER n’en a, par exemple).
À l’inverse, le site épuré affiche parfois plus d’informations : par exemple, les tarifs sont listés en première et en seconde classe, et dans les détails on peut noter que les durées des correspondances sont indiquées et pas seulement les horaires (éviter le calcul mental, toujours).
En prime, Capitaine Train s’est souvenu des endroits que j’ai déjà cherchés et me les a proposés, j’ai pas eu à rechercher “Paris (toutes gares intra-muros)” dans la liste déroulante.
Et il me propose aussi d’ ”afficher tous les résultats (même bêtes)” si j’ai envie de découvrir les trains qui servent à rien, genre départ la veille, arrivée en même temps et tarif plus élevé. Notons que même avec les résultats bêtes, il a zappé l’option qui fait le tour par Grenoble et Veynes pour re-choper un train de nuit et ainsi occuper 9h30, avec quatre heures d’attente en gare, pour un trajet qui prend normalement environ 4h30 : ses résultats bêtes peinent encore à atteindre le niveau de crétinerie de certains de Voyages-SNCF…