Sécurité : conduisez dans la tempête
|C’est l’actualité du jour : la tempête en Corse. Des vents à décorner les bœufs, des risques de chutes d’arbres, de vols de tuiles, tout ça.
Donc, quoi qu’on fait ?
On vide les écoles.
Madame, monsieur, quittez votre boulot, venez chercher votre enfant, nous on s’en occupe plus.
L’idée des préfets et inspecteurs d’académie qui ferment les écoles est simple : imaginons une seconde qu’un accident arrive, la responsabilité de l’école, donc du département, peut être engagée.
Franchement, ça me rend limite malade.
J’ai eu, il y a quelques années, affaire à un proviseur qui avait un minimum de c.… Bon, c’était une femme, mais vous saisissez l’idée.
Un jour de janvier 94 (le 14 plus précisément), un ordre d’évacuation de l’établissement a été donné. Après les interminables pluies de l’automne 93, le niveau de la Drôme était monté largement au-delà de la cote d’alerte, dépassant le niveau de la route au lieu dit du Saut de la Drôme et menaçant le pont en aval du bourg de Luc-en-Diois, où mes parents habitaient alors.
Le mot d’ordre avait été radicalement différent de celui qui sévit ce jour en Corse. C’était en gros : essayez de récupérer vos gosses si vous pouvez, mais ne prenez pas de risque inconsidéré. Si vous ne pouvez pas venir les chercher et n’avez personne pour les héberger dans la ville, nous les entasserons à l’internat, quand bien même il est censé être fermé, et dans le gymnase s’il y en a trop pour l’internat.
Bref, la priorité était à la sécurité des élèves, quitte à faire bosser les pions un week-end où ils auraient dû être chez eux (l’internat était à l’époque ouvert par périodes de douze jours) et à stocker quatre élèves dont deux demi-pensionnaires dans des chambres prévues pour trois internes.
Pour la petite histoire, une voisine remontant en voiture m’a ramené, en prenant la petite route du camping parce que le pont principal n’était plus franchissable.
Évacuer les écoles en Corse, ça n’est pas une mesure de sécurité. Qui peut dire le contraire ? Qui peut prétendre qu’inciter des centaines de personnes à prendre la route en pleine tempête, dans des régions où les routes sont tordues et où les arbres sont nombreux, est une mesure de sécurité ?
Assurer la sécurité des élèves et de leurs parents, c’eût été d’enfermer ceux-là dans les écoles avec un stock de sandwiches et de flotte et de laisser ceux-ci se cloîtrer chez eux ou au boulot.
L’évacuation est en fait profondément dangereuse, et si quelqu’un a un accident de la route dans ces conditions, je l’encouragerais à attaquer la responsabilité du type qui l’a décidée.
Précisément parce que le but de cette personne n’était pas d’assurer la sécurité des populations (bien que ce soit théoriquement son rôle), mais juste de se dégager de sa responsabilité (bien qu’il l’ait cherchée, sinon il ne serait pas inspecteur d’académie).