PPL, an trois
|Et ben voilà : comme tous les ans à cette période, c’est l’anniversaire de ma licence de pilote privé. Et comme un (ex-)journaliste a du mal à renoncer à bon marronnier, ce petit billet de rentrée est consacré à mon bilan aéronautique de l’année écoulée.
Le compte est bon
Il y a un an, j’avais 109 h 45 min de vol, dont 53 h 18 en solo, après avoir fait une trentaine d’heures en douze mois. Et aujourd’hui ? Et bien… Mon carnet arrive à 161 h 44 dont 91 h 54 de solo. Si je compte bien, ça fait donc 51 h 59 sur l’année, dont 38 h 36 en solo.
Sur le plan budgétaire, le total débité à ce titre fait 5888 € (auxquels il faudrait ajouter 330 € de cotisations club/FFA et assurances). Ça fait donc l’heure de vol à 113 € bruts, ce qui est déjà moins cher que les 125 à 130 € que je payais à Enghien : la plupart des avions que j’ai utilisés tournent entre 100 et 106 € de l’heure moteur1.
Oui, mais il faut aussi compter la colonne crédit. D’abord, le club a une politique d’encouragement aux navigations : sur la période concernée, les rabais sur les longs vols et sur les sorties club m’ont fait gagner 325 €. Les participations des passagers m’ont également économisé environ 450 €. Enfin, j’ai eu des bourses sur une poignée de vols, pour un total de 305 €, j’y reviendrai. Au total, ça me fait donc 4800 € au bilan, soit une moyenne à l’heure de vol de 92 €.
Le truc rigolo, c’est que dans l’ensemble, j’ai moins dépensé que l’année d’avant. Parce que certes, j’ai dépensé un gros billet de 1000 de plus en avion, mais c’est loin de ce que j’ai économisé en loyer (à 400 € par mois, ça va vite). Mon budget mensuel à Angoulême est environ 300 € inférieur à ce qu’il était à Paris.
Côté avions, on note le retour du Cessna 172, avec 4:08 de vol sur F‑HYZY. J’étais lâché sur les quadriplaces à aile basse mais, pour faire faire le tour de la ville à mes parents, j’ai trouvé plus pratique d’avoir une aile haute et un vrai marchepied. Les Cessna 150 et 152 m’ont porté une quinzaine d’heures, l’Oceanair TC160 presque 7 h… Quant au MCR 4S, deux remarques : d’abord, ses problèmes de refroidissement ont été résolus à l’automne ; ensuite, comme il boit du sans-plomb et que le prix de la 100LL augmente, il regarde tranquillement les tarifs des autres avions s’envoler. Du coup, c’est désormais assez clairement l’avion du club le moins cher au kilomètre, et j’ai fait presque 13 heures dessus !
Voyages, voyages
Alors, qu’est-ce que j’ai fait de tout ce temps ? D’abord, comme prévu, un aller-retour à Enghien pour le meeting du club. Cinq heures de vol, avec un retour plus rapide que l’aller… malgré 1/2 d’escale à Blois pour faire le plein ! Un vent de dos d’une trentaine de nœuds, sur un avion qui vole autour de 95 kt2, ça change la vie.
Ensuite, un tour de Corse avec deux camarades. L’île est vraiment jolie, mais sa météo fin octobre est un peu aléatoire : on a eu des conditions parfois splendides, parfois plus délicates, et quelques turbulences très violentes en passant certains caps. Au retour, le sud du Limousin était couvert de nuages bas : j’ai fait 15 min entre 500 et 600 ft3. Je l’avais déjà fait quand j’étais élève, mais jamais aussi longtemps et jamais après plus de 3 h de vol, et je dois dire que l’atterrissage a été un vrai soulagement.
Après d’autres vols qui m’ont permis de continuer à découvrir la région, j’ai profité d’un déplacement d’une instructrice pour aller à Cannes. J’ai à cette occasion découvert le dernier avion du club que je ne connaissais pas encore : F‑GFGO, un Piper Cherokee Archer II. Confortable et rapide en croisière, généreux en espace à bord et en charge utile, c’est un vrai avion de voyage… à condition de ne pas vouloir regarder dehors : la qualité des plexiglas est médiocre. Ajoutez qu’il n’y a qu’une issue, côté passager, et pour un pilote-photographe un peu claustrophobe, cet avion est une torture. On arrive également très vite en butée de profondeur à l’arrondi, une sensation pas vraiment rassurante : les Cessna ont plus de marge de ce côté.
Apprendre…
Comme “un bon pilote continue à apprendre” et que cet hiver, l’aéro-club d’Angoulême a relancé le vol de nuit, je m’y suis mis. Nous sommes une petite dizaine à avoir passé la qualification VFR de nuit. Dans mon cas, j’ai fait 7 h de vol et 28 atterrissages nocturnes, ce qui a représenté l’essentiel de mon activité de décembre-janvier.
Le vol de nuit, c’est cool : on voit à des distances hallucinantes, tout est calme, jusqu’au moment où on survole la Touvre et où on se retrouve quasiment sur la tranche parce là, et nulle par ailleurs, il y a une turbulence bien brutale. C’est aussi une grosse remise en question : il faut trouver de nouveaux repères, que ce soit pour assurer sa hauteur ou pour naviguer, et l’estimation de la bonne trajectoire en approche est sensiblement plus difficile que de jour. Le pire, c’est la hauteur de l’arrondi, d’autant plus difficile à évaluer que les instructeurs aiment bien jouer à demander à la tour d’éteindre l’éclairage de temps en temps. C’est en tout cas une bonne école pour la tenue des paramètres… De là à penser que ça devrait faire partie du cursus de base, il n’y a qu’un pas.
J’ai aussi profité du printemps pour découvrir le rallye aérien — plus exactement, le pilotage de précision et la course de navigation4. C’est là aussi un exercice à part entière : il faut apprendre à voler droit et à vitesse constante tout en regardant à droite, à gauche, devant, dessous, à la recherche de repères, de chiffres, de lettres et de sujets photographiques. Le cerveau doit faire vingt choses en même temps et, au bout d’une demi-heure, on sort rincé. Mais la satisfaction quand on a tenu une trajectoire pas trop moche et qu’on a trouvé quelques photos est indéniable.
Accessoirement, comme la FFA est une fédération sportive, les participants aux compétitions peuvent profiter de bourses. Dans mon cas, le comité régional aéronautique m’a remboursé plus de 300 €, l’équivalent de presque trois heures de vol !
J’ai aussi pu faire un vol dans un vrai planeur, une expérience fort intéressante : les pieds sont indispensables pour faire un virage, puis pour empêcher le planeur de continuer son virage, tandis que la main passe son temps à lutter avec le manche pour rester sur le bon angle et ne pas sortir de la pompe. Les lignes droites ne dépassent pas dix secondes, mais il y a quelque chose d’assez jouissif à arriver à bien se placer dans une ascendance et à entendre le variomètre se prendre pour une soprano.
…et enseigner
L’autre grosse nouveauté de l’année, c’est que j’ai commencé à donner des cours. Pas d’instruction, il faut une qualif à part que je n’ai pas, mais du Brevet d’initiation aéronautique. Il s’agit, en gros, de prendre des gamins de 14–15 ans (plus une paire d’adultes) pour leur présenter un peu tout ce qui existe en aéronautique, du drone quadrirotor au lanceur spatial en passant par le Cessna du club, du contrôleur aérien au mécanicien spécialiste de la turbine en passant par le pilote d’essais, de Montgolfier à Baumgartner en passant par Earhart, de la météo à la navigation en passant par les principes du vol, de l’hélice à l’empennage en passant par les ailes.
C’est très large et le public est assez varié : la plupart des gosses sont des passionnés, mais il y en a aussi qui sont venus nous voir au forum des sports d’Angoulême et qui ont juste vu l’occasion d’apprendre des trucs hors du cadre scolaire. L’inscription coûte 10 € et, à la sortie, le mioche a fait trois baptêmes de l’air et il a un vrai diplôme de l’Éducation nationale5 : c’est franchement pas cher.
Il y a aussi un vrai intérêt pédagogique : quand on attaque les notions de fonctions, de forces, etc., pas mal de jeunes ont du mal à voir l’intérêt. Là, on fait des petits calculs tout bêtes pour savoir où atterrira un planeur ou quelle quantité d’essence il faut embarquer, on fait de la trigonométrie pour savoir quel cap prendre en fonction du vent, on utilise des courbes polaires pour expliquer le décrochage qu’ils ont très concrètement vu en vol, on fait un devis de masse et centrage pour vérifier que les forces agissant sur l’avion sont équilibrées… On touche aussi un peu à l’histoire, à l’anglais, à la géographie, à la sociologie, à la biologie même (vous saviez que les femmes encaissent mieux les ressources que les hommes ?).
Évidemment, vulgariser, c’est pas toujours mon fort, et j’ai tendance à beaucoup détailler. C’est donc aussi un exercice pour moi : tenter de rester grand public et pratique. Heureusement, j’étais évidemment pas seul : on est une grosse demi-douzaine dans l’équipe et, généralement, on était deux ou trois “profs” à chaque cours.
En passant, j’ai aussi retrouvé mes élèves à l’examen : dans la salle où ils passaient le BIA, les aspirants profs passaient le CAEA, le diplôme qui permet officiellement de leur faire cours. Le taux de réussite de nos élèves (plus de 90 %) a été meilleur que le nôtre, mais bon, je l’ai eu.
Et demain, je recommence
Et la suite ? Ben…
On commence à arriver près des 200 h. C’est le quota auquel la DSAC Sud-Ouest arrête de nous les briser menues pour accéder aux pistes restreintes, c’est le quota auquel les organisateurs de certains meetings arrêtent de paniquer (sachant que bien des organisateurs de meetings ne paniquent pas, même à 45 h, et que ça se passe pas plus mal), c’est aussi le moment où les qualifications style instructeur deviennent envisageables.
Mais bon, là-dessus, j’en saurai plus dans un an.
- Ce qui permet d’estimer qu’il y a en moyenne une petite dizaine d’euros, soit cinq bonnes minutes, de temps de chauffe moteur, taxi jusqu’à la pompe, etc., pour chaque heure de vol.
- Il est mou, DD…
- Moins de 200 m.
- Air Navigation Race ou ANR dans le jargon local.
- Et c’est le premier pour certains d’entre eux.