Petzetel

Si j’en juge par Google News, la presse est una­nime : un avion bom­bar­dier d’eau, de type Pet­ze­tel, s’est écra­sé en Grèce aujourd’­hui. Son pilote s’en est heu­reu­se­ment tiré.

Capture de Google News "Petzetel"
Cap­ture de Google News

Je pen­sais rela­ti­ve­ment bien m’y connaître en bom­bar­diers d’eau, mais un Pet­ze­tel, ça me disait rien. En plus, uti­li­sé en Grèce : c’est pas très loin et c’est un pays qui uti­lise beau­coup d’a­vions euro­péens, amé­ri­cains ou cana­diens, jus­te­ment ceux dont j’ai l’ha­bi­tude. On me dirait que la Chine a des bom­bar­diers d’eau que je connais pas, je dirais “Chouette j’ai appris un truc”, mais la Grèce ?…

Et puis, en bout d’une dizaine de secondes, j’ai compris.

Et j’ai ri, et j’ai pleu­ré, et j’ai cher­ché la source.

Et je pense avoir trouvé.

C’est là.

Vous voyez ce para­graphe, juste avant l’intertitre ?

Petzetel dans l'article grec d'origine
Cap­ture de Mixa­ni Tou Xronou

Oui, c’est logique. Si on écrit sim­ple­ment PZL, en alpha­bet latin, dans un texte en alpha­bet grec, le lec­teur va spon­ta­né­ment lire RZ, puis une lettre qu’il connaît pas, puis il va com­prendre que ce tri­plet-là est en latin (oui, tous les Grecs connaissent notre alpha­bet de nos jours)… Bref, ça va lui com­pli­quer la lecture.

Le rédac­teur a donc fait le truc intel­li­gent : trans­crire la pro­non­cia­tion et mettre la marque entre paren­thèses. Un peu comme si on met­tait “KamAZ (КамАЗ) a gagné 16 des 20 der­niers Dakar”, parce qu’on vous connaît, bande de petits dis­traits : si on met­tait pas la trans­crip­tion, vous liriez “Kam à trois”.

Le rédac­teur a fait le truc intel­li­gent, et der­rière l’AFP a fait le truc con : copier bête­ment la tra­duc­tion Google. Mais vrai­ment bête­ment. Stu­pi­de­ment. Abru­ti­ment. Insondablecrétinement.

Traduction Google
Cap­ture de Google Traduction

Parce que oui, logi­que­ment, Google Tra­duc­tion a pris “Πετζετέλ” pour une marque et l’a retrans­crit en latin : Pet­ze­tel. “Eurê­ka,” me dis-je en mon for inté­rieur à l’ins­tant où je lus ceci, “voi­là la source.”

Bon, un être modé­ré­ment intel­li­gent, quand il voit “Pet­ze­tel (PZL)”, il se dit un truc du style “Oh tiens c’est mar­rant d’é­crire ça comme ça, on dirait vache­ment qu’il y a la pro­non­cia­tion et une abré­via­tion bizarre !” Du coup il jette un œil à la source, com­prend même sans lire le grec, met “PZL” dans un moteur de recherche quel­conque, voit que le prin­ci­pal construc­teur d’a­vions polo­nais s’ap­pelle PZL Mie­lec, et il met “PZL” dans sa dépêche.

Mais le type de l’AFP n’est pas modé­ré­ment intel­li­gent (ou bien il a eu 43 secondes pour pondre sa dépêche, ce qui ne laisse pas, même à Ste­phen Haw­king, le temps d’être modé­ré­ment intel­li­gent). Il a donc bat­tu un record de conne­rie en virant la marque et en ne gar­dant que la prononciation.

Et, comme d’ha­bi­tude, la pompe à dépêches s’est char­gée de répandre cette erreur gro­tesque dans les plus grands jour­naux de France et de Navarre, trop pres­sés de copier-col­ler pour prendre le temps de lire.

Je vous laisse, je retourne pleu­rer, rire et peut-être râler.