Travail dominical (bis)

Un mien cou­sin vient de m’en­voyer un cour­riel se plai­gnant qu’il devra tra­vailler le dimanche “à par­tir du dimanche 13/08” et m’in­vi­tant à signer une péti­tion pour deman­der l’in­ter­dic­tion du tra­vail dominical.

J’a­vais déjà abor­dé le sujet en août, mais j’a­vais peut-être pas été assez clair. Voi­ci donc un point de vue moins filtré.

Si j’é­tais adepte de mau­vais esprit, je pour­rais me bor­ner à dire que le pro­chain dimanche 13/08 étant en 2017, voter à gauche en 2012 est la meilleure solu­tion au problème.

Mais bon, per­son­nel­le­ment, ce sujet me fait par­ti­cu­liè­re­ment chier. On a une part de la popu­la­tion, lar­ge­ment majo­ri­taire je le recon­nais, qui jouit d’un pri­vi­lège par­ti­cu­lier : il est inter­dit de la faire tra­vailler le dimanche. Ce pri­vi­lège est inex­pli­cable, sinon par une réfé­rence reli­gieuse que plus per­sonne ne devrait oser sor­tir depuis 1905.

Cette popu­la­tion consi­dère son pri­vi­lège comme tel­le­ment natu­rel que non seule­ment elle le défend (ce qui peut se com­prendre, les réflexes pro­tec­tion­nistes étant ce qu’ils sont), mais elle refuse d’ad­mettre qu’il est loin d’être universel.

Les jour­na­listes bossent le dimanche. Les tech­ni­ciens qui les accom­pagnent aus­si. Les trans­ports bossent le dimanche, de même que les pro­fes­sions de san­té, les forces de l’ordre, les ser­vices de secours, les mili­taires. Les res­tau­ra­teurs, les hôte­liers, les auber­gistes bossent le dimanche. L’É­du­ca­tion natio­nale bosse le dimanche, dans les inter­nats ouverts le week-end ou rece­vant le dimanche soir.

Et je ne par­le­rai même pas des éle­veurs, qui bien sou­vent non seule­ment bossent le dimanche, mais n’ont pas non plus de récu­pé­ra­tion dans la semaine : même si ce n’est que quelques heures pour nour­rir et traire les ani­maux, le bou­lot, c’est sept jours sur sept.

Pour ma part, je bosse le dimanche depuis 2006, comme maître d’in­ter­nat puis comme jour­na­liste. Mon père a bos­sé le dimanche toute ma jeu­nesse, jus­qu’en 1990. Et dans aucun de ces cas je n’ai enten­du par­ler de contre­par­tie sala­riale ou de jours de récupération.

L’in­ter­dic­tion du tra­vail domi­ni­cal concerne une par­tie de la popu­la­tion, une grosse par­tie certes, mais une par­tie. De nom­breuses pro­fes­sions n’ont jamais ces­sé de tra­vailler le week-end, et dans de nom­breuses pro­fes­sions cela est consi­dé­ré comme natu­rel et per­sonne n’a jamais pen­sé à entrer en grève pour obte­nir des week-ends de trois jour ou un salaire doublé.

Pis, la plu­part des cré­tins qui défilent actuel­le­ment contre le tra­vail domi­ni­cal trouvent tout natu­rel de trou­ver un bis­trot ou un hôpi­tal ouvert après le match de foot du dimanche soir. Et sup­po­sons que les tech­ni­ciens de la télé cessent de tra­vailler le dimanche, et l’on ver­ra 65 mil­lions de frus­trés bru­ta­le­ment sevrés de Dru­cker mani­fes­ter pour qu’on les réquisitionne.