L’austérité n’est pas bonne

C’est sans doute le scoop de l’an­née : les pays qui appliquent des poli­tiques d’aus­té­ri­té (ou de rigueur, appe­lez ça comme vous vou­lez) se plantent. Pis, ils se plantent pro­ba­ble­ment plus que s’ils n’a­vaient pas appli­qué ces politiques.

C’est La Tri­bune qui le dit, et si La Tri­bune tape sur l’aus­té­ri­té alors que ses articles sont plus sou­vent d’ins­pi­ra­tion libé­rale que com­mu­niste, c’est que le constat est impla­cable : non seule­ment les pays sous poli­tique de rigueur sont dans la merde (ce qui, après tout, est logique, ça jus­ti­fiait cette poli­tique à la base), mais il y a une cor­ré­la­tion entre la pro­fon­deur de l’aus­té­ri­té appli­quée et l’ag­gra­va­tion de leur situa­tion, vue ici sous l’angle de la dette publique.

Bien enten­du, La Tri­bune fait quand même preuve d’une petite amné­sie. Elle affirme en effet :

La pre­mière remise en cause de ce modèle était inter­ve­nue en décembre lorsque le FMI, l’un des arti­sans de la cure d’aus­té­ri­té dans le sud de la zone euro, avait recon­nu avoir mal éva­lué l’im­pact de l’aus­té­ri­té sur la croissance.

Elle oublie que les poli­tiques de rigueur (qu’on appe­lait, à l’é­poque, “ajus­te­ments struc­tu­rels”) ont été démon­tées dès 2002, dans une charge d’une vio­lence d’au­tant plus remar­quable qu’elle venait d’un prix Nobel d’é­co­no­mie, ancien vice-pré­sident de la Banque mon­diale, aux pre­mières loges pour consta­ter les effets des ajus­te­ments impo­sés à l’A­mé­rique du Sud dans les années 90. Ça s’ap­pe­lait La grande dés­illu­sion et ça devrait être étu­dié au collège.

On sait depuis bien long­temps que les poli­tiques de rigueur ont très sou­vent des effets néga­tifs, entraî­nant un dés­équi­libre bru­tal des éco­no­mies qu’elles pré­tendent soi­gner. Une poli­tique de rigueur est inté­res­sante pour cal­mer l’emballement d’une éco­no­mie frap­pée par une infla­tion mas­sive, comme la France des années 60, mais en matière de lutte contre la pau­vre­té ou d’é­qui­li­brage bud­gé­taire, elle est à l’é­co­no­mie ce que la sai­gnée est à la médecine.

Vingt ans après, ce constat com­mence peu à peu à s’im­po­ser même chez les libé­raux. C’est une bonne nou­velle, mais il est tout de même ten­tant de se lais­ser aller à un petit “je vous l’a­vais bien dit”.